Win or Lose
La première série originale de Pixar vaut-elle le coup ? Oui et non.

Quelques mois après Dream Productions (dont j'ai parlé brièvement ici), Pixar est de retour sur Disney+ avec une nouvelle série. Et, pour la première fois depuis la création du studio, il s'agit d'une création originale, et non d'un spin-off d'un film existant.
Dans Win or Lose, on suit l'histoire d'une équipe junior de softball. Avec une petite particularité : chacun des 8 épisodes se concentre sur un seul personnage, qui fait partie de l'équipe ou qui gravite autour. J'ai pu voir les quatre premiers épisodes, et sans entrer dans les détails, on y découvre le quotidien de Laurie, la fille de l'entraîneur; puis de Frank, l'arbitre mais également professeur; et enfin le quotidien de Rochelle, une autre joueuse; et de sa mère, Vanessa, dans le quatrième épisode.
Quand la machine à concepts s'enraye
Ce qui m'a immédiatement frappé, c'est à quel point Pixar s'est enfermé, au fil des années, dans des concepts plus ou moins malins. Bon, c'était déjà le cas sur les films. Et si un rat cuisinait ? Et si des jouets prenaient vie ? Et si on entrait dans la tête d'une petite fille ? Et si on suivait le parcours d'une âme ? Et si l'eau sortait avec le feu ? Et si, et si, et si...

Mais c'est encore plus flagrant sur Win or Lose. Car, contrairement à un long métrage, la série n'a que très peu de temps pour développer son univers. Et qui dit concept (et surtout un concept par épisode), dit explication du concept. Et ça bah... ça prend du temps.
Chaque épisode ne dépassant pas les 20 minutes (générique de fin compris), il faut donc à la fois introduire l'univers, le personnage, son quotidien, et son petit concept personnel, tout en racontant une histoire globale sur l'entièreté de la saison. Autant vous dire que c'est tout simplement mission impossible.
Car oui, chaque personnage a non seulement droit à son épisode, mais également à son idée et sa petite particularité visuelle. Pour vous donner un exemple, je vais me concentrer sur les deux premiers épisodes, disponibles depuis ce mercredi 19 février sur Disney + (les six autres épisodes seront diffusés à raison de deux épisodes par semaine chaque mercredi).
What you see is what you get
D'un côté on a Laurie, la fille du coach. De l'autre, Frank, un professeur qui arbitre également les matchs de softball. La première est la moins douée de l'équipe, en plus d'être la fille de l'entraîneur. Du coup, elle se met une pression énorme, et ça se traduit par une boule de sueur, qui prend vie et l'accompagne au quotidien. Évidemment, plus Laurie est stressée, plus la boule grandit. Mouais. C'est sympa, comme pouvaient l'être les premiers courts-métrages de Pixar, mais c'est pas révolutionnaire.
Pour Frank, on part dans un concept encore plus littéral. Frank est célibataire et cherche l'amour sur les applications de rencontre. Depuis sa séparation, il a perdu confiance en soi et s'est fabriqué une armure, qui le protège des critiques, mais l'empêche également de se révéler à de potentielles futures conquêtes. Comment tout cela se traduit à l'écran ? Par une grosse armure bleue, car pourquoi se casser la tête ?
Certaines séquences sont encore plus ringardes (j'suis pas assez jeune pour dire cringe), comme lorsque Frank "entre" dans son smartphone, et affronte Tinder comme un jeu. Il "swipe" pour éviter des profils qui ne l'intéressent pas; ou joue au ballon avec une fille qui l'intéresse (le ballon représentant une bulle SMS, qui symbolise leur conversation).


Laurie et "son stress"
Bref, tout est tellement évident et "on the nose" qu'on a l'impression de faire face à un premier jet. Les personnages ne sont pas mauvais. Mais la façon de nous les décrire est bien trop simpliste. Laurie et Frank ne sont rien de plus que des marionnettes, qu'on anime pour mettre en avant chaque concept.
C'est un peu le même problème qu'Inside Out 2, qui introduisait beaucoup trop de nouveaux personnages pour bien les développer. Là où le premier volet était tout aussi conceptuel, mais aussi plus "simple." À l'inverse, je trouve la série Dream Productions plus intelligente. On reprend l'idée d'Inside Out : l'action se passe toujours dans la tête de Riley, et plus particulièrement sur la partie qui s'occupe de ses rêves. On ne doit donc plus expliquer comment tout cela fonctionne. Ce qui permet aux scénaristes de développer une vraie histoire, celle d'une réalisatrice qui a perdu de sa superbe et se retrouve coincée dans un système "hollywoodien" qui écrase tout sur son passage.
Visuellement, c'est un sans-faute
Rassurez-vous, tout n'est pas à jeter, loin de là. Visuellement, la série est magnifique. Il y a quelques trouvailles qui prouvent que Pixar reste un studio bourré de talent. On n'est pas sur un produit signé par une équipe B, avec moins de moyens qu'un long métrage.
Bon, je suis un peu moins fan du style des personnages, mais ça, c'est un avis très personnel. Je les trouve trop "ronds", pas assez finis. Par moments, on dirait des Barbapapa avec des bras et des jambes et ça manque un peu de personnalité (les chevilles et les pieds du coach, par exemple, me rendent fou de rage).

Il y a aussi d'excellentes scènes, parfois émouvantes, notamment dans l'épisode 3 et 4, mais je vais éviter les spoilers. C'est d'ailleurs avec ces deux épisodes que la série décolle enfin. Les concepts passent un peu au second plan, et on est face à une véritable histoire (ça ressemble presque à un court-métrage de 35 minutes).
J'ose espérer que la suite sera à la hauteur, en se concentrant sur les personnages, et les interactions entre eux. Car, encore une fois, l'idée de Win or Lose n'est pas mauvaise. L'univers est sympa, et quand la série fonctionne (notamment quand on revoit une scène d'un autre point de vue, ou racontée par un autre personnage), c'est vachement bien. Mais pour le savoir, il faudra attendre le 12 mars, date de diffusion des deux derniers épisodes.